Histoire du « phone » en milieu scolaire

24 novembre 2010

Histoire du « phone » en milieu scolaire

Il est 7 heures et demie, le dernier coup de sonnette vient de retentir et pas un seul en Terminale D2 ne se sent concerné pour le moment. Encore faut-il qu’ils arrivent à discerner ce signal dans la cacophonie qui règne dans la salle. Il suffit d’y faire un tour, de rapprocher votre oreille des casiers de tables, aussitôt après on vous annoncera, et vous ne pourrez que corroborer, que vous êtes devenu sourd-muet, sourd d’endurer la pluie de sons qui s’y abat et muet de ne pouvoir rien dire ou faire pour que cesse ce remue-ménage. Hier soir, en regagnant les domiciles, l’instruction donnée par l’enseignant était de proposer un plan détaillé pour un sujet de dissertation. Quelques élèves y compris moi-même, ont souffert de venir une heure plus tôt ce matin pour accomplir la tâche du forçat. Au fond de la salle, entre les mains d’un groupe mixte d’élèves, dits muna bobo 1, on peut dénombrer une série de téléphones multimédias. Le kapo 2 ou le garçon le plus « stylé » de tous, celui qu’on reconnait à l’application fréquente des écouteurs à ses oreilles, se distingue par ses abonnements chez Orange, MTN et Camtel ; ses trois mobiles, dit-il avec fierté et arrogance, lui ont coûté une fortune. C’est pourquoi il n’hésite pas, à la pause comme aux heures du cours, à les exhiber à ses camarades, d’ailleurs c’est à ces atouts de frime qu’il doit sa célébrité au collège ALFRED SAKER. Pendant que certains s’échangent des sons ou des « hot » vidéos par Bluetooth, d’autres offrent gratuitement leurs prestations de DJ à la classe. « Le prof arrive », s’écrie un élève qui se trouvait encore dans le couloir, en plein pourparlers avec une mo nga 3 inconnue dont il a quand même réussi à enregistrer le numéro de portable. Ils se reverront certainement dans les vestiaires un quart d’heure plus tard, à condition que le done man 4 sache bien agencer son « verbe » dans le SMS qu’il lui écrira une fois revenu en salle. Lorsque le professeur franchit le seuil de cette dernière, les activités du petit marché s’estompent, ses commerçants rangent leurs marchandises et ses clients leur argent. D’un ton autoritaire, il demande aux élèves de présenter leurs travaux sur la table. A peine se lève-t-il pour se diriger dans la première rangée qu’une sonnerie aiguë l’interrompt et captive la classe entière. En une fraction de seconde, le cellulaire qui l’a émise a été éteint et rangé. Le geste éclair n’a suscité aucun soupçon chez le professeur, vraisemblablement transformé en inspecteur. Il réclame alors le responsable avec une voix vibrante de colère. Mais les trente minutes qui suivront serviront à traquer en vain l’auteur de cette perturbation. Coco est pourtant assise au milieu de ce petit monde ; elle se camoufle, retient son souffle et évite de se trémousser. De pareilles imprudences lui ont déjà valu la confiscation de son précédent portable. C’était en plein évaluation de Maths ; elle a convaincu au moyen d’un SMS un mougou 5 de la classe de lui transmettre les réponses de quelques questions complexes. Comme elle avait omis de mettre le son du téléphone en position OFF, le message en lui parvenant a émis un signe sonore qui a alerté le surveillant. Dans ce genre de situation, la classe sait se montrer solidaire et taciturne. Le professeur, pour ne pas être couvert de ridicule, abandonne ses investigations pour poursuivre le contrôle des devoirs. Aujourd’hui, il choisit de n’expulser personne car il est conscient du fait que s’il commence, il sera contraint à la fin de négocier avec les trois ou cinq élèves qu’il en restera de la classe pour achever son programme de la matinée. Il entame aussitôt la correction de l’exercice. Pendant qu’il explique une notion importante à ses élèves, son téléphone sonne. Toute la classe braque ses yeux sur lui, même ceux qui n’étaient que présents en chair. « Allo ! Oui, j’arrive, je suis en circulation, accordez-moi juste 10 minutes, le temps que je descende du taxi pour vous rejoindre. », déclare le professeur à son interlocuteur lorsqu’il décroche son mobile. Le bip de fin de conversation enclenche alors dans la salle des éclats de rires, des sifflets et des claquements de mains.

1 enfant de riches ; 2 personne qui sort du lot et fait l’objet de convoitise ; 3 jolie fille ; 4 garçon futé ; 5 personne facilement manipulable, faible de caractère.

 

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Commentaires

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Francoperen
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Francoperen
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