Au Faso, on travaille, on prend de la peine mais ce sont les fonds qui manquent le plus

4 février 2011

Au Faso, on travaille, on prend de la peine mais ce sont les fonds qui manquent le plus

L’initiative de rédiger ce billet nait de ma profonde indignation à l’issue d’un débat houleux qui m’a récemment opposé à quelques amis burkinabés. Tout part d’une critique émise par ceux-ci à l’encontre des gardiens de nuit (qui touchent en moyenne 25 000 FCFA par mois) qui, apparemment passent la majeure partie de la nuit à rêver plutôt que de veiller sur leurs employeurs et les biens de ces derniers. Autre chose avant d’entrer dans le but du sujet : j’ose espérer que Mr Jean de La Fontaine ne se retournera pas dans sa tombe pour me reprocher d’avoir transformé sa célèbre citation tant dans la sémantique que dans la syntaxe.

Au Burkina Faso, le Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti (S.M.I.G) pour les travailleurs, à l’exception des employés agricoles et des personnes liées à leur employeur par un contrat d’apprentissage est fixé à 32 218 FCFA. Cela suppose que l’ouvrier burkinabé actif bosse pendant environ 6 heures de temps chacun des 30 jours du mois pour obtenir exactement une prime de 1 074 FCFA au terme d’une journée de labeur. Faites vous-même le calcul et vous verrez à quel point ces chiffres sont insignifiants en termes d’argent. Aussi, il faut noter que très peu d’employés connaissent leur droit en matière de contrat de travail. Le plus souvent quand il vienne chercher du travail, ils se mettent dans la position la plus défavorable qui soit, ce qui du coup transfert tout le pouvoir de décision à leur futur patron. C’est le cas de certaines femmes de ménage qui sont embauchées dans des agences de nettoyage à Ouaga et qui reçoivent un salaire de 10 000 FCFA chaque fin du mois. Pourtant elles arrivent tous les jours à partir de 5 heures du matin dans les locaux des entreprises ou instituts où elles sont affectées pour blanchir les toilettes et d’autres surfaces. N’est-ce pas là une forme d’exploitation de l’homme par son semblable?

Je reviens donc sur la discussion que j’ai eue avec mes frères africains. Ceux-ci soutiennent que le salaire d’un employé doit être fonction des efforts qu’il fournit et de la situation exceptionnelle que vit son employeur. Je m’explique. Le salaire est fonction des efforts dans la mesure où, pour rémunérer un individu, on évalue la quantité de travail qu’il a produit. Et il est fonction de la situation vécue par son employeur lorsque ce dernier justifie, par exemple, le salaire dérisoire qu’il paye à sa bonne par l’argument du salarié qui vient à peine d’intégrer la vie active. Je suis tout à fait d’accord avec la première vision mais quant à la seconde, elle m’écœure. Je vais vous dire le pourquoi : non seulement en procédant ainsi on ne reconnait pas la valeur humaine et n’oublions pas que, quand bien même la situation du patron serait favorable (cadre qui gagne bien sa vie), il ne ferait pas d’effort à son tour dans le sens avantageant sa ménagère. Et bien tout ceci n’est pas juste. D’ailleurs je n’ai pas hésité à le leur répéter en m’appuyant sur quelques faits prépondérants de la société. Aujourd’hui, si on intègre de plus en plus la politique RSE (Responsabilité Sociétale et Environnementale) dans les entreprises, c’est parce qu’il est temps de changer cette mentalité chez les hommes.

Cela consiste, en partie, pour les boss à mettre en place des mesures qui permettront à leurs employés d’être dans des conditions favorables pour produire un bon rendement. En ce sens que si vous avez à votre disposition quelqu’un qui vous offre ses services, et peu importe le type de services, vous devez contribuer à ce qu’il soit épanoui quand il le fait. Je connais au moins une famille où lorsque vous arrivez chez eux, vous ne vous rendez même pas compte qu’ils hébergent une bonne. Celle-ci est certes là pour s’assurer que le bébé ne manque de rien, mais la façon dont on la traite à la maison lui fait oublier qu’elle est employée. De cette façon, elle est plus motivée dans son travail. Et je peux vous affirmer avec certitude qu’aussi minable que puisse être sa rémunération, elle ne boudera pas ses patrons car ils sont devenus pour elle des parents. Cependant si les gens sont parfois strictes et inhumains envers leurs employés c’est parce qu’il y a bien eu des exemples moins édifiants par le passé. Des gens bien ont eu à accorder leur confiance et leur estime à leur chauffeur, leur gardien ou leur boy, et en guise de remerciement ceux-ci leur ont dérobé des objets précieux ou d’importantes sommes d’argent avant de s’enfuir. L’Africain n’est pas reconnaissant parfois, c’est là où le bât blesse.

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